A l’occasion des derniers travaux dans l’église de Thil, une pierre d’autel curieuse a été mise à jour. Posée horizontalement sur un bâti en maçonnerie, ses dimensions sont de 204 cm sur 60 cm, pour une épaisseur de 15 cm. Cette pierre est ornée de trois motifs sculptés représentant une croix du Languedoc à l’intérieur d’un cercle.
Les deux cercles latéraux sont doubles pour un diamètre de 18 cm ; le cercle central est simple et la croix d’un dessin un peu différent.
Au-dessus des motifs latéraux, deux fragments témoignent que le bloc a été scié et constitue un réemploi. Une encoche d’une quinzaine de centimètre a été pratiquée sur la partie médiane ; fermée par un couvercle de marbre blanc, elle abrite certainement des reliques.
Ces constatations étant faites, se pose la question de son origine dans notre région ou la pierre est rare ; compte tenu de son poids et des moyens d’autrefois, celle-ci est vraisemblablement Thiloise. On peut envisager plusieurs hypothèses :
La première église :
La deuxième charte de coutumes de 1256 nous apprend qu’il existait à cette date, une église à Thil, dédiée à Saint Martin. On ne peut assimiler ce bâtiment à l’église actuelle, datée des environs du XVème siècle. Cette construction ancienne devait faite en majeure partie de corondages et » paillebart « , bois et mortier d’argile, mais elle pouvait inclure des parties plus nobles.
Le château :
Situé sur la butte dite encore de nos jour » butte du château « , sa construction appelle les mêmes remarques. C’était un fief des seigneurs de l’Isle, dont les armes portaient la croix occitane.
L’hypothèse probable :
Il s’agit d’une très ancienne dalle funéraire enfouie dans le sol de la 1ère église, récupérée et sciée plusieurs siècles plus tard, lors de la construction du bâtiment actuel. Au XIIème siècle, le sol des chapelles, puis des nefs des églises, fut ouverte à la sépulture des notables, à un point tel que certaines se trouvèrent entièrement pavées de pierre tombales.
Celles-ci servant de sol, étaient ornées de motifs en demi relief pour ne pas gêner la marche des fidèles, ce qui est le cas pour notre dalle. La croix occitane pourrait signaler le tombeau d’un membre de la famille des Jourdain de l’Isle, seigneurs de Thil, ce qui permettrait de la dater des XIIème ou XIIIème siècle.
Tout ceci doit, bien sûr, être pris au conditionnel, faute d’archives, aujourd’hui disparues. Toutefois, la présence émouvante de ces très anciens vestiges d’une époque révolue, nous rappelle que notre présent est toujours lié au passé, et l’intérêt qu’il y a pour notre village de préserver nos racines, comme il vient de démontrer qu’il en est capable.
PS : Au XIIIème siècle, pendant quelques décennies, les villages de Thil et de Bretx revinrent par héritage à une branche cadette des seigneurs de l’Isle Jourdain, par Alpays de l’Isle qui épousa Bernard d’Astaffort. Leur fils Raymond Jourdain 1er, mort en 1256, habitat le château de Thil ; son épouse, Guillauma d’Alfaro, fut l’unique membre de cette famille à s’intituler » seigneuresse de Thil « , ce qui parait marquer un attachement particulier pour le village. Elle aurait pu souhaiter reposer dans l’église avec son époux et peut être avons-nous découvert sa pierre tombale ? Au début du XIVème siècle, Thil fit retour dans le giron de la branche aunée par sentence arbitrale de l’évêque Bertrand de l’Isle (Saint Bertrand) arguant que la propriété des fiefs, ne pouvait se transmettre par les femmes.